Depuis la montée en puissance des sites de réservation en ligne, assez mal anticipée, les rapports se sont tendus entre les hôteliers et les plateformes qui les mettent en marché. Les grands et petits acteurs de notre industrie reconnaissent à demi-mot avoir raté un virage technologique, faute de vision ou de moyens. Ils ont laissé échapper, en partie du moins, le contact direct avec leurs clients en s’en remettant trop facilement aux intermédiaires.
Depuis, ils n’ont de cesse de ramener ces clients vers les canaux directs, en agitant de nouvelles règlementations, en engageant le bras de fer ou en enrichissant les programmes de fidélité. Le tout avec plus ou moins de réussite.
Chaque gain de pourcentage de ventes directes est une petite victoire, assez vite contestée par une innovation technologique ou une campagne média intensive des plateformes internationales. Le combat est assez inégal compte tenu des moyens à leur disposition.
Parfois même, la victoire tourne à la catastrophe quand un Digital Market Act européen va à l’encontre de son but initial, aggravant la distorsion de concurrence sur le Net.
L’objectif de croissance poursuivi par les leaders hôteliers n’est pas étranger à la volonté de peser davantage dans les discussions avec les agences en ligne. L’heure est aux stratégies agressives quand la taille est suffisamment forte pour imposer des choix radicaux. Comment interpréter autrement le choix du groupe Accor de ne plus travailler en B to B qu’avec quatre intermédiaires exclusifs au niveau planétaire ?
L’autre priorité est de travailler la forte personnalisation des nouvelles marques, encore plus vitale pour les groupes qui n’ont pas la taille critique. C’est une réponse à la « commoditization », la banalisation d’un produit hôtelier réduit à un tarif, une date et une localisation.
Ce nouvel affrontement remet le client au centre du jeu. Après tout, il lui appartient de choisir son canal de distribution. Alors comment lui indiquer le bon choix ? Comment le convaincre du bénéfice qu’il peut tirer d’un lien direct avec sa marque favorite, si ce lien arrive à s’installer ? C’est un formidable terrain de jeu pour les marketeurs qui doivent prouver leur valeur ajoutée.
La période est propice dans le contexte d’une intensité concurrentielle récente entre plateformes et autres géants du Net. Elle est de nature à rééquilibrer les canaux et les rapports de force….
Une nouvelle révolution technologique vient bouleverser toutes les projections. L’utilisation décomplexée d’un chat, piloté par l’intelligence artificielle, peut conduire le client à se passer des plateformes pour choisir l’établissement le plus conforme à son profil et ses attentes, sans même toucher un clavier ou un écran. Tentez l’expérience, vous serez surpris de la facilité avec laquelle Gemini et autre ChatGPT vous dirigent vers des propositions ciblées et des liens de réservations directes.
Depuis quelques mois une nouvelle rupture, au moins aussi puissante, a fait son apparition. Elle va certainement installer de nouvelles règles du jeu, encore plus rapidement que la première l’a fait.
Faut-il s’en réjouir ? Sûrement à court terme, car toute concurrence est bonne pour secouer les positions dominantes. Mais ne soyons pas naïfs, il n’y a pas de déjeuner gratuit disent volontiers les Américains. Les propositions naturelles de l’intelligence artificielle le resteront-elles longtemps ?
Les hôteliers trop confiants ne vont-ils pas passer d’une domination à une autre ? Les Huns apparemment sympathiques valent-ils mieux que des Romains un peu trop arrogants ?
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